L'oupalong
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🌫️ OUPALONG Quand l’aube tire la couverture — Salope. Le mot claque dans la brume des rêves. L’Oupalong ouvre les yeux tandis qu’un souffle ancien — plus vieux que la haine — glisse sur ses songes et lui colle à la peau, comme un rêve mal coiffé. Cheveux hérissés de souvenirs, enfouis sous les pores, là où le sang reprend, lentement, le rythme des jours qui ravissent au temps Ses lumières. Aveugles minutes, sans cœur, sous les ongles noircis, qui grattent la peau, l’Oupalong reprend les mots, non désirés, revenus de loin embrasser ses tympans : — Anomalie détectée : isolement chronique. — Patience, j’ai aimé. — Absence de fonction identitaire stable. — Patience, je deviens. — Sujet en échec relationnel. — Patience, ça revient. — Déficit de valeur sociale. — Patience, je retiens. — Non conforme à la norme attendue. — Patience, à jamais. Assis sur un vieux rêve, fané, froissé, il lutte contre le sommeil qui colle encore à ses paupières — une torpeur douce comme un piège, attendant la nuit comme on espère un amant. Sous l’angle mort d’un matin soupirant, l’Oupalong crache des mondes qui recommencent — de travers, presque sans lui. À l’écart. Des fausses routes. Des gestes mécaniques. De sa chair bancale qui glisse entre ses pas et de l’horizon qui recule dès qu’il le fixe. Ses pieds s’enfoncent dans le froufrou des brumes. Sa vigilance s’échappe comme un chien errant. — Diagnostic : visibilité excessive. — Patience, apprends-moi. Il vacille. Il sait que rien n’est là. Mais tout insiste. Les voix tricotent des toiles fragiles avec le fil des vieilles fissures. Caché, relégué, enterré vivant, il est accosté — doucement bani — par les terres et les océans qui trahissent l’amour, et l’oubli des odeurs d’hier comme des fruits d’antan. Il se pense dans la soif d’un bonheur changeant, croyant flairer son gibier le plus alléchant. Mais nul n’échappe aux lois du bâton. Même la beauté trébuche parfois, croyant frôler sa moitié — cet amour singulier, réservé, qui souhaitent, secrètement, une autre forme de lien : plus vaste, plus tendre, plus fluide. L’espoir, idiot, aveugle Risible, sans forme Ni obstacles. Celui qui certains jours, change de visage, puis chuchote des promesses plus longues qu’un jour sans pain. Parfois si lointain qu’on finit par l’abandonner — comme un mouchoir ajouré Jeté Sur l’équimose du présent. — Profil à risque : tendance à la récidive émotionnelle. — Patience, tout finit par lâcher. — Sujet non essentiel à l’environnement. — Patience, solitaire est mon chant. L’espoir encore, traqué dans chaque souffle, chaque battement, chaque corps animé. Têtu, loyal, Même sous un temps clément, il ne change jamais son fusil d’épaule. Il s’attache, comme on s’acharne, harnaché aux souvenirs doux-amers des promesses d’hier qui s’effacent sous chaque printemps. Contre les cabosses du temps, les pommettes d’Oupalong soulèvent des dunes de sel jusqu’aux cils, là où des sourires — ravissants — tiennent bon. Et résistent. Par le rire. Matin et soir, l’Oupalong espère ces éclats de joie qui percent les murs, rebondissent, et s’échouent en échos sourds, un peu sales, un peu tachés d’hiver, mais qui, jusqu’ici, accouchent de printemps. Cette période fragile, qui ne promet rien — sinon les murmures de la vie qui tombe, patiemment, des bouches du ciel jusqu’aux rictus de la nuit affamée qui espère vainement. — Donnée instable, à réinitialiser. — Patience, je t’attends.
Il était une fois un être un peu cassé, un peu perdu, qu’on appelait l’Oupalong. Chaque matin, il se réveillait dans un brouillard, avec le cœur lourd et des pensées grises. Des voix bizarres lui disaient ce qui n’allait pas chez lui : "Tu es seul", "Tu n’es pas comme les autres", "Tu ne sers à rien"... Mais lui, il répondait toujours doucement : "Patience". Car même s’il vacillait, même s’il se sentait invisible, il gardait en lui une chose précieuse : l’espoir. Un espoir un peu cabossé, un peu bête parfois, mais toujours là. Et chaque jour, l’Oupalong attendait. Pas pour fuir, mais pour ressentir, encore un peu. Car même dans la tristesse, il y avait ces petits éclats de lumière, comme des sourires de sel, qui annoncent le printemps… même au cœur de l’hiver.